MUNITIONS IMMERGEES - TETE DE FUSEE - VAR - MEDITERRANEE
Cette photographie sous-marine a été prise lors d'une plongée sur un site très fréquenté du Var (France). Des munitions, sous toutes les formes, sont encore disséminées dans de nombreuses zones sous-marines.
Proverbe de plongeur démineur : OBJET INCONNU TOUCHE A TON CUL
Proverbe de plongeur démineur : OBJET INCONNU TOUCHE A TON CUL
La notion de munition immergée désigne les situations où des munitions ont été perdues ou volontairement jetées dans les eaux marines, douces ou saumâtres, parfois continentales ou souterraines. Ce concept est directement ou indirectement lié aux situations de séquelles de guerres ou d'activités militaires. Il évoque un double risque : d'explosion ; et de pollution induite par les munitions ainsi que contamination chimique des chaînes alimentaires ; à court, moyen ou long terme selon les cas. Quatre-vingt-dix ans après l'armistice de 1918, et soixante ans après la défaite de l'Allemagne nazie, les armes immergées (conventionnelles ou chimiques) des armées successives peuvent encore nous empoisonner (littéralement, économiquement et métaphoriquement). Elles ont été volontairement immergées, pour s'en débarrasser à moindre coût, ou pour éviter qu'elles ne tombent aux mains de l'ennemi, ou parce qu'elles risquaient d'exploser ou de fuir en raison de leur état de dégradation. Une partie, qui n'est pas la plus importante, a simplement été accidentellement perdue en mer, suite à des combats, naufrages, sabordages ou échouages. Certains sites marins et lacustres ont régulièrement été utilisés comme zones d'exercice de tir sur cible, ou pour des essais, incluant le cas particulier des essais nucléaires. Certains pays (maritimes ou non, comme la Suisse) ont utilisé des lacs et des zones humides comme sites d'exercices et de décharge.
Le problème de toxicité induit par les munitions (militaires et de chasse) le plus étudié a d'abord été celui qui est induit par le plomb (cause de saturnisme et neurotoxique à très faible dose chez le fœtus et l'embryon), mais depuis quelques années une littérature abondante a porté sur le rôle des munitions militaires dans les séquelles de guerre. De nombreux composés toxiques ou écotoxiques ont été utilisés pour la fabrication de projectiles depuis trois siècles ; certains ne sont ni dégradables ni biodégradables (ex : plomb, mercure, arsenic et plus récemment uranium appauvri dans le cas des munitions anti-blindage). D'autres ne sont que lentement dégradables (TNT, Perchlorates...). Ces composés sont principalement retrouvés dans le sol et dans les sédiments terrestres et marins où ils peuvent exercer leurs effets toxiques, voire être remobilisés par les invertébrés, les animaux fouisseurs, certains oiseaux... D'autres de leurs composants sont moins toxiques, mais peuvent poser problème au delà de certaines seuils (nitrates, cuivre, zinc, laiton, cadmium...). Un cas particulier est celui des munitions chimiques qui contiennent des toxiques très stables (tabun, sarin, ypérite, lewisite, arsine, etc.) tout particulièrement dans le cas des munitions immergées en grande quantité après les deux guerres mondiales.
- 1/4 du milliard d'obus tiré pendant la Première guerre mondiale et 1/10ème des obus tirés durant la Seconde guerre mondiale n'ont pas explosé pendant ces conflits. De plus on sait, pour les avoir retrouvés, que de gros obus de la Première Guerre mondiale se sont enfoncés au moins à 15 m de profondeur dans des sols relativement durs, sans exploser. Il est à craindre que dans les marais, tourbières, vasières, mares et étangs forestiers, fleuves et canaux, des obus se soient enfoncés bien plus profondément encore. On sait qu'en tombant sur des sédiments meubles jusqu'à huit obus sur dix n'explosaient pas.
- Depuis 1945 (déminage organisé), plus de 660 000 bombes ont été dégagées, ainsi que 13,5 millions de mines et 24 millions d'obus ou autres explosifs.
- La dangerosité des munitions ne s'atténue par avec le temps, au contraire. En 56 ans, 617 démineurs sont morts en service.
- Chaque obus muni de sa douille contient deux amorces contenant chacune deux grammes de fulminate de mercure, soit un gramme de mercure toxique pur).
- Tous les explosifs nitroaromatiques présentent une toxicité pour l'homme ou l'environnement et laissent des résidus toxiques qui contamineront l'environnement après leur détonation. (C'est un fait utilisé par les enquêteurs pour identifier les explosifs et leur provenance après un tir ou une explosion). Le nitrotoluène, le nitrobenzène et le nitrophénol, et moindrement le nitroanisol et de nitronaphtaline ont été utilisés dès la Première Guerre mondiale.
- L'explosif le plus commun en 1914-1918 était l'acide picrique qui est toxique. L'enveloppe (chemise) des munitions et en particulier des obus est très robuste, mais non éternelle. L'oxydation des obus entraine la formation de picrates très instables (explosif) qui rendent ces obus de plus en plus dangereux avec le temps.
- Les douilles étaient quant à elles remplies de nitrates (qui sans être toxique lorsque présent à faible dose, pose à des doses plus importantes de graves problèmes environnementaux dont eutrophisation voire dystrophisation des milieux)
- Le cuivre, le cadmium, le zinc, le plomb, l'arsenic et l'antimoine étaient des composants ou contenus classiques des munitions conventionnelles. Beaucoup d'obus allemands de la période 14-18 contenaient un fumigène à base d'arsenic pour permettre aux artilleurs de mieux repérer le point d'impact de l'obus et régler leur tir. L'arsine a été très utilisée dans les obus chimiques. Ce sont des polluants majeurs aux doses où ils sont présents dans ces munitions. De plus la toxicité de ces produits est synergiquement exacerbée.
- Le mercure perdu ou utilisé par les amorces de munitions militaires est surtout lié à la période 14-18 et 39-45 en Europe, dont en Allemagne, Belgique et France (surtout dans la Zone rouge (séquelles de guerre) pour la France) et localement dans les autres pays en conflit, y compris sous la mer en Baltique.
Les chaluts remontent souvent des obus ou d'autres types de munitions, nécessitant parfois l'intervention de démineurs (91 contacts ont été déclarés en 2004). Ils remontent parfois des objets rares ; ainsi 3 obus de 280 mm, 50 cm de long et pesant 100 kg environ ont été remontés le 30 novembre 2007 par le chalutier breton l'Alcatraz de Lorient, à 11 km de l'île de Groix qui ont justifié le déplacement de 4 plongeurs-démineurs. Ces derniers ont réimmergé ces obus pour les détruire sous l'eau à 2,5 kilomètres à l'Est de la pointe de Gâvres où se trouve un centre d'essais de la Délégation Générale pour l'Armement (ancien groupe d'Études et de Recherches en Balistique, Armes et Munitions (GERBAM)). Ce type de munition, inhabituel n'a été utilisé que par de petits "cuirassés de poche" allemands (Deutschland, Sheer et Admiral Graf Spee) et les croiseurs de bataille Scharnhorst et Gneisenau qui ont séjourné à Brest du 22 mars 1941 au 11 février 1942, avant de rentrer en Allemagne via le Pas de Calais (opération Cerberus).
La "Fosse de Beaufort" (ou "Beaufort's Dyke" pour les anglophones) est une fosse marine séparant les îles d'Irlande (notamment Irlande du Nord) de celle de Grande-Bretagne (plus exactement de l'Écosse ; C'est la partie la plus profonde du North Channel (dit "Canal du Nord" pour les francophones). Cette fosse est aussi connue comme l'un des plus grands sites sous-marin ayant été utilisé en Europe comme décharge pour des munitions (conventionnelles et chimiques) "excédentaires" et matériels de guerre (dizaines de sous-marins U-Boats allemands notamment). Elle a aussi reçu des déchets radioactifs.